Critique Théâtre : Hamlet, la version « barock » !

Hamlet a beau avoir une allure très rock actuellement au Théâtre Mouffetard, il souffre pourtant des mêmes maux que Shakespeare lui a originellement affublé (un vrai problème avec son oncle fratricide et sa mère infidèle). En découle une mise en scène punchy, volontairement décadente, avec pourtant quelques baisses de régime.

Hamlet est ici incarné par un comédien à la technique solide (Romain Cottard) qui développe la schizophrénie apparente de son personnage avec beaucoup de gourmandise. Son physique de jeune romantique rebelle l’apparente aisément à l’univers d’un Musset fort tourmenté, version 2011.

Toutefois les revirements émotionnels que certaines de ses répliques suscitent, finissent par lasser. Dans cette sombre mélancolie, si proche de la folie, Hamlet reste peut-être ici un personnage trop inaccessible pour son public.

En favorisant constamment la rupture du ton shakespearien (tantôt comique, tantôt dramatique), dans un langage trop actuel et dans une mise en scène musicale et visuelle très contrastée, cette version 2011 nous étourdit plus qu’elle nous éblouit.

Hamlet, comme nouveau point de départ expérimental

Toutefois il ne faut pas s’arrêter à ce premier sentiment de gêne vis-à-vis du discours et de la forme car on sent ici également l’envie et la joie du metteur en scène et de sa troupe d’expérimenter  sur scène des situations inhabituelles, des propos ou des postures décadentes.

Cet « Hamlet de la rue Mouffetard » propose même des tableaux saisissants, proches du cinéma et de son montage (grâce aux jeux de lumière, le récit peut proposer des flash-backs ou des arrêts sur image plutôt audacieux).

Igor Mendjisky qui nous présentait l’année dernière un spectacle très drôle et maîtrisé sur le masque (Masques et Nez), fait justement intervenir des comédiens masqués à la présence décalée réjouissante, à un moment où la schizophrénie du héros a atteint son apogée.

Enfin, la troupe composée de huit comédiens alterne un grand nombre de rôles principaux ou secondaires. Ce qui a pour effet de redynamiser le jeu et notre attention par rapport au récit.

On garde ainsi un souvenir contrasté de ce spectacle ambitieux et expérimental. Le célèbre « To be or not to be » restant un passage obligé relevé ici haut la main.

Laetitia HEURTEAU

Hamlet de William Shakespeare

Adaptation: Igor Mendjisky et Romain Cottard
Mise en scène: Igor Mendjisky
Avec Clément Aubert, James Champel,  Romain Cottard, Fanny Deblock, Yves Jégo, Imer Kutllovci, Dominique Massat, Arnaud Pfeiffer
Costumes May Katrem
Lumières: Thibault Joulié
Musiques et sons: Hadrien Bongue

Du 20 janvier au 19 mars 2011
Du mercredi au samedi à 20H30, dimanche à 15H
Location: 01 43 31 11 99

Théâtre Mouffetard