Un endroit comme un autre

Présenté en compétition officielle à la Biennale de Venise l’année dernière, Un endroit comme un autre (Nowhere special) d’Uberto Pasolini sort enfin dans les salles françaises. Il s’inspire d’une histoire vraie : celle d’un jeune père dans le milieu ouvrier de Belfast, qui, élevant seul son enfant et se sachant condamné par un cancer, tente de trouver une famille d’accueil pour son garçon de 4 ans. Un nouveau défi pour le comédien James Norton qui incarne avec intensité ce personnage de la vie quotidienne, en pleine crise physique et  intérieure.

Uberto Pasolini a pris le parti de raconter cette histoire avec le plus de réalisme possible, sans pathos superflu. Il ancre son récit dans l’Angleterre d’aujourd’hui, dans ce milieu social des gens méritants (John est nettoyeur de vitres), qui vivent à la périphérie des grandes villes. C’est un personnage digne, malgré sa solitude et la difficulté de son métier. Il est dévoué corps et âme à l’éducation de son enfant.

Le personnage qu’incarne James Norton, est physiquement comme psychologiquement en constante évolution. Physiquement bien sûr, puisqu’il est atteint d’un cancer qui l’affaiblit chaque jour un peu plus, lui creuse les joues, lui donne peu à peu ce teint tristement jaunâtre.

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Un trésor d’émotions et d’interprétation

Mais c’est surtout le très beau travail de composition intérieur du comédien qu’il faut ici saluer. Un simple regard d’impuissance ou de colère envers son entourage qui ne le comprend pas mais qui tente de l’épauler malgré tout, un geste protecteur et plein d’affection pour son fils, en disent plus long que tous les dialogues. Et c’est un jeu bien sûr qui se construit avec le partenaire, ici un jeune acteur de 4 ans avec qui Norton a tissé une réelle amitié et complicité. De sorte que le jeu de l’enfant est également bouleversant.

A souligner ici, malgré le sujet très dur, l’absence totale de pathos appuyé. L’extrême pudeur avec laquelle cette histoire est racontée permet d’interroger avec émotion et justesse plusieurs thématiques profondes :  quel héritage laisse-t’on à son fils que l’on ne va pas voir grandir (comme l’illustre la très belle scène de la boite à souvenirs préparée avec amour par le jeune père). Qu’est-ce qu’adopter, éduquer ? Une femme célibataire peut-elle prétendre à l’adoption ? Le statut social dans lequel l’enfant va grandir va-t’il effacer celui du père dans le souvenir de l’enfant ? Qu’est-ce que vivre ? Qu’est-ce que disparaître ?…

Nowhere special est une histoire qui repose sur les non-dits et la très belle complicité des comédiens. On en ressort grandis, à travers cette expérience humaine à laquelle nous pouvons tous nous identifier. C’est un film fort, atypique et profondément humain. A ne surtout pas manquer.

Un endroit comme un autre 

(Nowhere special)

De Uberto Pasolini

Avec James Norton, Daniel Lamont

Sortie en France depuis le 8 décembre 2021

 

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