Avignon 0FF 2022 : Les critiques de Cyna Bel

Cette année, Esprit Paillettes a une envoyée spéciale au Festival d’Avignon et s’appelle Cyna Bel. Au fil de l’eau, découvrez ses coups de cœur du OFF. 

K barre

Barrées, les demoiselles !  

Voici un spectacle 100% plaisir : BurlesK, par Les Demoiselles du K barré, que j’ai découvertes lors de leur passage à Marseille, et qui se produisent en juillet sur la scène du théâtre Pixel Bayaf à Avignon.  

Ces trois demoiselles-là ont du piquant plein la bouche et les reins. Elles présentent un spectacle burlesque où elles dansent, chantent et nous parlent comme de bonnes copines. Elles sont aguicheuses, jouent des plumes comme des codes de séduction. Et c’est drôle ! C’est ultra vivant. C’est de l’effeuillage. Mais c’est bien plus. C’est un message pour la libération et l’acceptation des corps, plein de paillettes et de couleurs.

Bonus : Vous pouvez acheter à la sortie vos propres caches tétons.

Je vous recommande ce spectacle pour finir la journée sur une note colorée, avant d’aller déhancher vos propres corps dans les rues d’Avignon.

BurlesK, 21h30, au Théâtre Pixel Bayaf.

Courgette

De l’écran à la scène : Courgette au festival d’Avignon  

Après « Ma vie de courgette », le dessin animé double césarisé, voici l’histoire de l’orphelin Courgette adaptée dans une mise en scène très réussie – et musicale – présentée sur les planches du théâtre des Béliers au festival d’Avignon.  

Courgette devient orphelin à neuf ans, après avoir tiré sur sa mère alcoolique (et violente). Le voilà placé au foyer des Fontaines. Il y a les adultes bienveillants, de Raymond, le gendarme au grand cœur qui lui rend visite chaque dimanche, à Rosy l’éducatrice qui a tout d’une maman poule. Il y a ses amis : Ahmed et surtout Simon, le grand bagarreur écorché. Et puis il y a Camille. La jolie Camille. La Camille forte et menacée. Celle dont il tombe amoureux.

Les personnages sont tous attachants. Ils sont incarnés avec beaucoup de justesse par des comédiens et comédiennes qui se dédoublent (se détriplent et se déquadruplent). Passant de la naïveté poétique de l’enfance au monde désaccordé des adultes en un changement d’accessoires.

Le cri doux et puissant du blues les porte tout au long de la pièce. L’harmonica de Courgette répond à la voix tantôt douce tantôt rock de Camille et aux cordes grattées de Raymond. Batterie, piano, guitare… les instruments sont sur scène, intégrés dans un décor mis en place ingénieusement sur deux niveaux.

C’est une pièce pleine de lumière qui traite pourtant de la noirceur. C’est très cohérent, juste et précis.

Je vous recommande cette pièce pour vous immerger dès le réveil dans la magie d’Avignon. Comme un café chaud du matin, à la fois puissant et d’une chaleur réconfortante.

Courgette, 10h, au théâtre des Béliers. A partir de 9 ans.

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Machine de cirque : de l’émotion en roue libre !  

Dans le beau théâtre de La Scala Provence, j’ai assisté à un spectacle importé tout droit du Canada qui a provoqué une standing ovation.  

Six hommes sur scène.  Une haute machine aux allures d’invention de Géo Trouvetou, faite d’échafaudages, de planches et de roues de bicyclette. Il y a un drôle de batteur un peu zinzin. Ses compères tentent de le calmer. Impossible. Il rythmera tout le spectacle de ses punchs acoustiques déjantés. On sera émus. Epoustouflés. On rira (fort). Leur mise en scène est belle et précise. Il y a peu de paroles mais beaucoup de jeu. On retiendra de ce spectacle la force qu’ils puisent dans le regard des uns et des autres. La connexion qui les lie et se propage au public. Ils nous font presque oublier leurs prouesses techniques parce qu’ils sont touchants.

La salle est toute entière debout.

Je vous recommande Machine de cirque pour une soirée d’éclats de rires, de souffle retenu et d’émotion. Du grand spectacle.

Pour toute la famille (ainsi que les amis, les amis des amis, les amours et tous les autres).

Machine de cirque, à La Scala Provence, 20h50

Deux espaces écrins pour la Compagnie Hecho en casa  

Hecho en casa

J’ai assisté à deux spectacles proposés par la Compagnie Hecho en casa cet été à Avignon. J’ai aimé le pouvoir évocateur des mises en scène.  

Le premier s’intitule B.A.K. Trois initiales pour trois conteuses. Il vous faudra passer les remparts pour y assister, et rejoindre l’espace extérieur aménagé par La Scierie. On sort pendant une heure quinze des salles sombres avignonnaises, et c’est bienvenu. Dans cet écrin, se tiennent trois installations entre lesquelles les comédiennes nous font voyager, au sens propre comme au figuré. Elles se racontent au travers de leurs relations familiales, héroïnes de leurs propres vies. La première tranquille. La deuxième, tendre sous un air un peu bourru. La troisième – qui m’a le plus touchée –  ado révoltée.

Le second spectacle, Caché dans son buisson de lavande, Cyrano sentait bon la lessive…, est une adaptation de la célèbre histoire de Cyrano de Bergerac tirée du livre jeunesse de Rebecca Dautremer. Il se joue entre les vieilles pierres de la Condition des soies, lieu qui met lui aussi incontestablement en valeur le spectacle.

L’histoire de Cyrano est transposée dans un univers japonais. C’est sur les visuels et l’atmosphère que la compagnie est novatrice. Les onomatopées japonisantes sont drôles. Le décor aux airs de jardin japonais, les costumes et les accessoires nous plongent dans un manga version Dautremer. On retrouve dans la mise en scène la beauté et le style si particulier de la dessinatrice. Une douceur nostalgique. C’est très réussi. L’utilisation de très beaux masques permet aux trois comédiennes des allers-retours réguliers entre le conte, au ton léger, et le drame que vit le héros.

Mais la beauté, c’est un peu long pendant cinquante minutes. Je ne suis pas passée loin de l’ennui. Cet écueil est évité dans B.A.K, grâce au format court de ses propositions. Car ce qui fait à mon sens la force de la compagnie, c’est que ce sont des artisans de l’atmosphère. Les mises en scène sont minimalistes, soignées et évocatrices. Les spectateurs sont plongés dans des ambiances sonores, visuelles et olfactives qui apportent aux contes de la profondeur. Que j’ai aimé sentir l’odeur du café chauffé devant mes yeux dans B.A.K !

Bonus : L’affiche du spectacle dessinée par Rebecca Dautremer est en vente dans le hall du théâtre.

B.A.K, à La Scierie, 18h15.

Caché dans son buisson de lavande, Cyrano sentait bon la lessive…, à La Condition des soies, 10h10. 

A partir de 10 ans (Les deux spectacles sont indiqués comme accessibles à partir de 7 et 6 ans, cependant je les déconseille pour les petits. Les sujets abordés parleront principalement aux adultes, avec des textes nécessitant une maitrise de la langue déjà avancée.)

C’est tes affaires ! : De l’impro qui rafraîchit ! 

© Philippe Pache . www.philippepache.com Photo LDD uniquement en rapport direct avec la promotion du spectacle et du Petit Théâtre . Droits affiches et flyers non compris C'est tes affaires! Du 3 au 14 avril 2019 Tout public dès 5 ans Tout est possible ! S’inspirer des objets apportés par le public pour créer un spectacle instantané. Respecter et incarner les désirs et les idées de ces jeunes spectateurs. Créer un spectacle unique, une éternelle première. C’est le défi que se lancent Odile Cantero, Tiphanie Bovay-Klameth et Alain Borek dans ce nouveau spectacle entièrement improvisé. Accompagnés musicalement par Renaud Delay et Jérôme Delaloye (en alternance), ils sont prêts à faire honneur à tout ce que les spectateurs ont envie de voir - ici et maintenant. Ces trois comédiens improvisent ensemble depuis plus de dix ans, au sein de différentes compagnies professionnelles en Suisse romande. Ils ont eu la chance de croiser la route de Renaud Delay et Jérôme Delaloye à l’Échandole, à La Grange de Dorigny ou encore au Théâtre 2.21, avec qui la collaboration est devenue rapidement une évidence. Tous habitués à des spectacles scolaires improvisés, ils ont eu l’envie de pousser l’idée plus loin en créant un spectacle spécialement pour le public du Petit Théâtre. Informations Du 3 au 14 avril 2019 Salle du Petit Théâtre Durée: 50 minutes Pays: Suisse Générique Création - coproduction : Le Petit Théâtre Lausanne, Cie Prédüm Conception et improvisation Alain Borek, Tiphanie Bovay-Klameth et Odile Cantero Musique en direct Renaud Delay ou Jérôme Delaloye (en alternance) Création lumière Stéphanie Rochat Scénographie Fanny Courvoisier Construction Jean-Marie Mathey Soutiens Etat de Vaud, Loterie Romande, La Mobilière, Migros Pourcent Culturel, BCV

© Philippe Pache – www.philippepache.com – C’est tes affaires !

A quelques pas du cœur d’Avignon, le festival Totem propose un spectacle d’improvisation réjouissant pour petits et grands.  

Ils font partie de la sélection officielle suisse pour le OFF d’Avignon. Une première pour de l’impro. Ils sont quatre sur scène : trois comédiens et un instrumentiste. Il y a aussi deux chaises et une boite. Rien de plus. Dans la boite : les objets déposés par le public avant le spectacle. Quelques jouets, parce qu’on est dans un théâtre jeune public. Mais aussi une mini trousse à pharmacie, une gourde ou encore des noix de cajou. Les objets inspireront le spectacle et seront tous utilisés. Ce sera à chaque fois différent. Et c’est une réussite.

Les comédiens nous embarquent rapidement dans l’histoire qu’ils construisent sous nos yeux. On suit leur aventure avec joie, dans un monde fait ce jour-là de réalisme magique. Les chansons improvisées donnent un vrai plus au spectacle. Il est question d’ouverture aux autres, du courage qu’il faut pour être soi-même et de l’acceptation de ses émotions.

A la sortie : apéro sirop pour papoter avec les artistes, avant de retourner dans le cœur d’Avignon.

Je recommande ce spectacle pour un moment de joyeuse détente. Il est comme une menthe à l’eau par un bel après-midi d’été. Sucré et rafraichissant, il procure de ces petits plaisirs qui donnent à la vie des éclats de joie.

Pour tout public à partir de 7 ans. NB : Le spectacle est programmé par la Sélection suisse en Avignon.

C’est tes affaires !, au festival Totem, 16h10. Le Totem – Art, Enfance, Jeunesse, 20 avenue Monclar, Avignon.

Biques : Un programme politique qui peine à s’incarner 

Biques

La Compagnie des milles printemps présente au Théâtre des Carmes le quotidien heurté d’une maison de retraite, sans parvenir à en restituer sa vérité.  

La pièce se joue dans une maison de retraite. Une troupe de femmes dans un décor de cloisons beiges. C’est l’histoire de leur lutte contre le projet de déménagement porté par le maire. Un projet qui les enverrait à la périphérie de la ville. Le parallèle avec la mise en marge de la société des personnes âgées est fait.

Tantôt résidentes, tantôt visiteuses ou employées, les comédiennes nous montrent le quotidien de la maison de retraite. C’est l’occasion d’aborder les questions de l’âgisme et du poids du patriarcat.

Malheureusement l’équipe peine à traduire son programme politique en théâtre. La pièce s’éparpille. La bande son enlève du poids au propos plutôt que de le souligner. On dénonce la mise à l’écart des personnes âgées, pourtant les résidentes sont interprétées par des jeunes femmes. La projection des témoignages recueillis dans l’EHPAD de Montlieu-la-Garde à la toute fin apporte l’émotion et la clairvoyance dont la pièce a manqué. La réalité est plus puissante que la fiction.

Biques, au Théâtre des carmes André Benedetto, 16h15.

spectacle_314212 sœurs : et le thriller s’invite au théâtre

Marien Tillet joue un conte fantastique au 11. Avignon. L’effet suspens est réussi.  

Seul en scène, Marien Tillet installe son histoire. Avec une fausse désinvolture, il nous conte la vie d’un anthropologue, Marc, auteur d’une thèse sur l’hystérie collective dans les campagnes. Celui-ci vient d’acheter une vieille armoire. Et de rencontrer une femme, en tous points parfaite pour lui. Marien digresse, puis revient à son sujet. On sent qu’il maitrise tellement son spectacle qu’il joue avec son public. C’est un conteur qui nous embarque dans son univers.

Au début, la scène est noire. Les éléments du décor sont mis en lumière au fil de la pièce. Ils sont peu nombreux mais évocateurs. La bande sonore créée en live – marque de fabrique de la compagnie Le cri de l’armoire – contribue à nous transporter dans une atmosphère de plus en plus sombre. Bientôt on comprend qu’on est dans un thriller. Le fantastique s’invite dans la salle. Le violon et le chant, amplifiés par la technique du looping, rajoutent de l’émotion. Prise dans l’histoire, je souhaitais connaitre le dénouement du drame ardemment.

Pour vivre du théâtre haletant, rendez-vous avec Marien Tillet au 11. Avignon.

2 sœurs, au 11. Avignon, 13h35.

Un concert improvisé unique en son genre  

Concert impro

Le Théâtre de la Tâche d’encre accueille en dernière partie de soirée une troupe d’improvisation fringante qui joue des cordes vocales.  

Ils sont sept sur scène. D’abord le maitre de cérémonie. Les bretelles joviales et le béret taquin. Il recueillera les inspirations du public et donnera les contraintes aux improvisateurs. Elleux sont quatre. A donner de la voix et des idées pour créer devant nous des scènes intégralement chantées. Pour les accompagner, deux musiciens : un claviériste et un air batteur (qui dispose bien de baguettes mais a pour seul instrument devant lui… le vide. Il manie avec une étonnante habileté les ondes bluetooth). Aussi fringants que leurs partenaires chanteurs et chanteuses.

La salle du théâtre de la tâche d’encre offre à la troupe de La Grimass un cocon de love avec ses coussins en forme de cœur et ses sièges mini format. Le public est enthousiaste. On clappe des mains et on chante ensemble les refrains qu’on ne connaissait pas trente secondes plus tôt. Les impros s’enchaînent. Une dizaine de chansons et c’est déjà la fin, sur un air d’opéra sans pareil. On ressort avec l’envie de prolonger la soirée et poursuivre la fête.

Je recommande ce spectacle pour relâcher la tension accumulée à courir les rues d’Avignon, avec du rire et du chant sans complexe.

Impro Interactive Playlist – le concert improvisé, au Théâtre de la Tâche d’encre, 22h  

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