Critique théâtre : L’Idiot de Fiodor Dostoïevski

C’est au Théâtre 14 que se joue en ce moment tous les soirs l’adaptation du célèbre roman de Dostoïevski. Thomas Le Douarec, en fervent lecteur, poursuit après Le Portrait de Dorian Gray, sa politique de redonner vie aux grands chefs-d’œuvre de la littérature. A la tête de cette même troupe, il adapte, met en scène et y joue en alternance. Arnaud Denis, une fois de plus y brille de son jeu précis et engagé.

Il faut peut-être d’abord rappeler ici que L’Idiot n’est pas un petit livre que l’on lira facilement entre deux stations de métro. C’est une somme que ce livre. Une vraie expérience de lecteur. Les choix de couper de nombreuses scènes tout en respectant la chronologie des événements ont dû être rudes pour l’adaptateur et le metteur en scène.

Mais que raconte finalement L’Idiot ? C’est l’histoire du Prince Mychkine, un être vraiment noble et vraiment bon qui revient en Russie après de nombreux traitements contre la dépression à l’Etranger. Cet homme, sans calculs ni arrière-pensées, qui s’habille sans bien s’en soucier avec des habits « estranges » (ceux de la Suisse dont il revient tout juste) se confronte à une haute-société russe, toute percluse d’hypocrisie, de savantes stratégies et de nombreuses mondanités.

Arnaud Denis joue avec une grande justesse, ce cœur pur et bienveillant sans jamais tomber dans une forme d’autisme qui ridiculiserait le propos de Dostoïevski. Il rejoint sans rougir la partition de Gérard Philipe dans l’adaptation cinématographique de la même œuvre, à la fois princier et d’une rare modestie.

L’intrigue nécessite de nombreux personnages : qu’à cela ne tienne, la cohésion de la troupe et l’ingéniosité du metteur en scène permettent à chacun ou presque de jouer plusieurs rôles (notamment Daniel-Jean Colloredo qui joue à la fois le général Epantchine et le général Ivolguine, deux personnages forts différents mais tous deux hauts en couleurs).

Malgré des décors quasi inexistants, cette mise en scène parvient à nous entraîner dans la véritable âme russe de ce récit. La première scène, dite d’exposition, où les acteurs miment le mouvement du train est particulièrement savoureuse. La vie, dans tout ce qu’elle a de tragiquement misérable ou de « folie des grandeurs » est ici très bien incarnée par certain les acteurs, récits, costumes (à signaler ici car ils sont magnifiques).

La dernière partie semble un peu longue toutefois et le personnage principal légèrement excentré de l’intrigue.

Généreuse dans cette fresque qui se déploie sous nos yeux et dans l’engagement passionné des acteurs, L’Idiot est à ne pas manquer, en ce moment, jusqu’au 30 juin 2018.

L’Idiot de Fiodor Dostoïevski

Texte et mise en scène de Thomas Le Douarec

Avec Arnaud Denis, Thomas Le Douarec (ou Gilles Nicoleau), Bruno Paviot, Daniel- Jean Colloredo, Fabrice Scott, Marie Lenoir, Marie Oppert, Solenn Mariani et Caroline Devismes

Théâtre 14

Lundi à 19h – Mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 21h
 matinée samedi à 17h

Représentation supplémentaire samedi 23 juin à 21h.

Réservation du lundi au samedi de 14h à 18h au 01 45 45 49 77
 ou www.theatre14.fr

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