La BOF du Dernier Vol : pour planer encore et toujours après le film…

Quand la lumière revient dans votre salle de cinéma, rien de plus dur que de quitter ce bel univers romanesque du Dernier Vol, fait de dunes à perte de vue, de chameaux, de costumes et de personnages hauts en couleur! L’écoute de la BOF du film permet alors de prolonger ce doux abandon sensoriel initié dans le film. Karim Dridi, le réalisateur revient ici sur ses choix déterminants pour faire de cette musique de film, une musique pas comme les autres…


LA GENESE

« Je vénère trop la musique pour aimer ce que l’on appelle vulgairement de la musique de film. Mon irréductible foi dans la force intrinsèque du cinéma m’a toujours convaincu qu’il n’avait pas besoin de béquille narrative ou émotionnelle pour s’exprimer pleinement. J’aime la musique au cinéma quand elle fait totalement partie de la narration et qu’elle devient une composante essentielle de la chair des personnages.
Je savais que pour un film comme Le Dernier Vol, avec deux grandes vedettes, un budget conséquent, des décors grandioses et un scénario romanesque, la musique aurait toutes les chances de tomber dans le cliché de la « grande » musique de film. Je décidai donc de ne pas m’adresser à un compositeur spécialisé dans le travail à l’image, de ne pas avoir recours à un grand orchestre, de ne pas utiliser de la musique occidentale teintée d’orientalisme, bref de tenter le pari risqué mais stimulant d’aller vers une musique qui serait totalement en phase avec mon écriture. Je voulais que cette musique soit un moteur dramatique et esthétique de mon film, mais surtout qu’elle soit en harmonie avec l’être que je suis, c’est à dire un auteur – réalisateur métisse qui puise son inspiration et sa force dans une culture issue d’un mariage entre l’Orient et l’Occident.

En découvrant l’album Tamas de Samir et de Wissam Joubran, j’ai immédiatement été séduit par la richesse et la beauté des mélodies. Je retrouvais tout ce que j’aime dans la musique arabe classique avec en plus une modernité nouvelle et originale.

Le Trio Joubran a commencé à improviser sur les images, ce qui m’a permis très vite de me rendre compte qu’il fallait allier à leur musique des cordes (violon, violoncelle) occidentales. Le trio Chkrrr est arrivé sur la pointe des pieds. Ils avaient pour mission délicate de se marier avec la musique des Joubran sans la dénaturer. Ils devaient aussi apporter le romantisme propre au personnage de Marie Vallières de Baumont joué par Marion Cotillard et donner aux images de grands espaces, le souffle que leurs instruments exprimaient. Je me souviendrai toujours de leur première rencontre. Les deux trios s’observaient et moi j’étais là au milieu pour faire le lien entre ces deux mondes, ces deux cultures. Une seule chose comptait, le film !

C’est de manière organique, devant les images, que le mariage a eu lieu. Les Joubran proposaient des mélodies puis en studio les deux trios et Yousef Hbeisch (percussions) improvisaient devant les images. Mon travail consistait à les diriger exactement comme j’aurais pu le faire avec des acteurs. N’étant pas musicien moi-même, je ne pouvais pas leur donner des indications techniques, mais uniquement des directions de couleurs émotionnelles, de sensation, de rythme, d’ambiance. Comme pour les comédiens, seule la qualité de l’interprétation m’intéressait. »

LES MUSICIENS

Le Trio Joubran

Les trois frères, Samir, Adnan et Wissam Joubran sont les héritiers d’une ancienne famille de luthiers de Palestine dont l’histoire court sur quatre générations. La sortie de Randana en 2004 marque la véritable naissance du Trio Joubran, suivi par Majâz en 2007. Au fil de ces albums, le nom des Joubran s’est imposé sur l’échiquier des musiques du monde et même au-delà, avec notamment une étape décisive au Carnegie Hall en 2006.
Leur répertoire est basé sur des compositions originales et sur des improvisations, et leur maîtrise du Oud (luth oriental) est singulière, tout comme le sont l’harmonie et la synchronisation dont ils font preuve chaque fois qu’ils se produisent sur scène. Le Trio Joubran est aujourd’hui reconnu comme un groupe de pointe parmi les plus grands créateurs des musiques du monde. C’est au Théâtre de la Ville, en octobre 2009, qu’a été présentée en France leur toute nouvelle création, À l’ombre des Mots, hommage au poète Mahmoud Darwich.

Egalement sollicités par le cinéma, les Joubran viennent de signer deux musiques de film, celle de Adieu Gary de Nassim Amaouche (avec Jean-Pierre Bacri) et celle du Dernier Vol de Karim Dridi. Plus que jamais ici, la musique du Trio Joubran rime avec intensité, vitalité et profondeur.
Plus d’info sur www.letriojoubran.com

Chkrrr

Chkrrr, c’est avant tout l’idée d’un son commun pour un trio atypique. Un ordinateur qui coince, un archet qui grince, des cordes qui crissent…
Chkrrr, c’est un truc qui gratte, une forme avec du relief, un sentiment de frottement.
Chkrrr, c’est surtout un ovni aux formes aléatoires, un orchestre de poche aux formules en suspens. Des points de suspension, d’interrogation, d’exclamation aussi. Plus que de simples hasards, on parlera d’accidents acceptés, d’incidents bienvenus – envisagés comme autant de sources d’émerveillement potentielles, de subtils détournements. Trois à la puissance numérique, avec l’assistance de machines qui empilent les pistes, dissimulées ou plus audibles, pour une esthétique du foisonnement minimaliste. Du paradoxe naît toute création.

« En mettre trop, ce n’est pas forcément un but en soi. On souhaite aller vers plus simple, plus dépouillé. » D’ailleurs, plus que fatras insensé, on dira chaos organisé entre ces mélodies sublimées, ces harmonies troublées et ces rythmes abîmés. De l’oxymore comme une intuition pour décrire le monde qui nous cerne.

Un cercle qui ne tourne pas rond, qu’il s’agit de dévisser de sa trajectoire, des orbites qui se trouent… Chkrrr parle aussi de cela entre les lignes, avec ce qu’il faut de distance et non sans une pointe de malice, de ces imperfections encore possibles, toujours souhaitables, de ces défauts de fabrication et autres malentendus qui laissent entrer une part d’humanité dans ces mécaniques de précision qui assourdissent notre quotidien. Les fausses notes font partie de la vraie vie.

Le maître mot de cette créativité : « Rencontre ».
Autour de la Danse, du Cirque Contemporain, de l’Image en général et tout naturellement du Cinéma mais bien évidemment et surtout, de la Musique à travers différents auteurs et compositeurs. La rencontre avec Le Trio Joubran apporte un ingrédient supplémentaire : le métissage sonore entre l’Orient et l’Occident.

Plus d’info sur Chkrrr: www.facebook.com/Chkrrr

NB: EVENEMENT LIVE !

Le Trio Joubran et Chkrrr seront en concert à LA CIGALE le 20 mars 2010 (20h).

Pour découvrir la musique du Dernier Vol, la télécharger, s’abonner à la newsletter des artistes: http://universalclassique.artistes.universalmusic.fr/BOFDernierVol/MiniSite/BOF_LeDernierVol.html

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