Chronique d’une mort annoncée

Mettre en scène la Révolution française dans la Maison de Molière, c’était en soi, un beau projet. Malheureusement, le texte de Georg Büchner, La Mort de Danton, entré pour l’occasion au répertoire et donné à entendre, se révèle ici, salle Richelieu, d’un ennui sans fond. La magnificence des décors et des costumes ne suffisent pas à nous faire passer un bon moment.

Que retenir du Danton de Simon Delétang, se répète-t’on, très perplexe, après 2h30 passées dans les « coulisses de l’histoire » sans entracte ?

Pas grand-chose, hélas. Car c’est à quelques jours de l’arrestation du célèbre révolutionnaire et de son procès que le spectateur est simplement convié. Une intrigue prévisible, bien sûr, mais surtout bien faiblarde avec un Danton plus noceur que député qui, se croyant au-dessus de tout, ne verra pas sa propre chute arriver.

Des discussions sempiternelles entre les pro-Robespierre (Saint-Just, le député Legendre) et les pro-Danton (Camille Desmoulins, des amis députés, Julie, la femme de Danton, Marion, une grisette, etc.) nous sont données de voir dans un grand désœuvrement général. Les comédiens rient beaucoup (souvent très fort), plaisantent, se congratulent… What else ?

Mais revenons à Danton que Loïc Corbery interprète dans une étonnante dimension romantico-tragique très appuyée. On ne connaîtra hélas jamais ce qui caractérise véritablement son personnage d’homme politique et d’homme, tout simplement : quelle figure de révolutionnaire représente-t’il dès son époque ? Quelles ont été ses actions, les missions qu’on lui a confiées par le passé ? Comment a-t’il évolué dans sa propre conception du pouvoir, de la violence et dans ses propres aspirations politiques ? Que représente pour lui la femme véritablement et la sienne en particulier ? Ici, vraiment, hélas, on n’en saura pas plus.

Une Révolution qui tourne en rond
La Mort de Danton, Salle Richelieu © Christophe Raynaud de Lage, coll. Comédie-Française

La Mort de Danton, Salle Richelieu © Christophe Raynaud de Lage, coll. Comédie-Française

On sent surtout ici des comédiens en roue libre. Le texte est trop ampoulé, trop vieillot. Il n’y a pas vraiment « à manger ». Certains comédiens, toutefois, tirent leur épingle du jeu, comme Guillaume Gallienne en Saint-Just ou Christian Gonon (qui joue plusieurs personnages bien antipathiques). Et dans ce monde très viril, hélas encore, les personnages féminins restent malheureusement très anecdotiques.

Sous le charme de cette troupe que l’on aime tant, de ces magnifiques costumes et décors qui font la renommée du Français, on applaudit, bien sûr, au salut.

Mais au final, que retenir de Danton, ou tout du moins, de celui de Georg Büchner ? Oui, qu’en retenir ? De l’ennui, pour ma part. De l’ennui, encore et toujours. Malheureusement.

La Mort de Danton, Salle Richelieu © Christophe Raynaud de Lage, coll. Comédie-FrançaiseLa Mort de Danton

De Georg Büchner

Mise en scène et scénographie de Simon Delétang

Avec Guillaume Gallienne, Christian Gonon, Julie Sicard, Loïc Corbery, 
Nicolas Lormeau, Clément Hervieu-Léger, Anna Cervinka, Julien Frison, 
Gaël Kamilindi, Jean Chevalier, Marina Hands, Nicolas Chupin...

Du 13 janvier au 4 juin 2023, en alternance Salle Richelieu.

Comédie-Française

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