Visite guidée de « La Ruche » par Loïc Corbery

Depuis 2005, la Comédie Française a son jeune premier attitré. Il s’appelle Loïc Corbery et se propose comme guide pour nous faire découvrir les coulisses de sa « Maison ».

La Ruche

« La Comédie Française a pour surnom « La Ruche » et le porte bien ! C’est un endroit très clos, ça butine de partout et je crois que dans ce lieu, on doit être 400 personnes, soit seulement une soixantaine d’acteurs », souligne Loïc Corbery qui vient de nous rejoindre à l’entrée des artistes, tout droit sorti des répétitions du Campiello de Goldoni.

Première halte, le Foyer des artistes, encore vide, car les comédiens de Cyrano de Bergerac n’ont pas encore investi les lieux. « Ce qui est drôle, explique Loïc Corbery, c’est qu’il y a au mur tous les originaux des portraits de Molière et des comédiens italiens qu’il y avait dans mes livres d’école. Mais le Foyer des artistes, c’est souvent un endroit de décompression où l’on se retrouve, se parle, et se détend. En été, c’est encore plus agréable parce qu’il y a le balcon ! »

Sur le plateau

Assis sur l’avant-scène, avec derrière lui le décor grandiose et fraîchement posé de Cyrano de Bergerac, Loïc Corbery se souvient de ses premiers pas sur les célèbres planches du Français. « En fait, j’ai été engagé le 17 janvier 2005, et on m’a quand même demandé de participer à l’hommage à Molière deux jours avant. Je n’avais jamais encore rencontré la troupe dans son intégralité, ni mis les pieds sur le plateau, et encore moins vu la salle pleine de la scène et soudain, je me suis pris en une soirée tout ce cadeau d’un coup ! Sans avoir encore la pression de jouer. La première du Menteur aussi ça a été un moment important pour moi. J’ai eu la plus grande peur de ma vie, et une de mes plus grandes joies.

En février 2006, Loïc Corbery a repris le rôle principal du Menteur, tenu auparavant par un certain… Denis Podalydès! « La première exigence de ce rôle était d’avoir à absorber ce texte pour pouvoir le réinventer, m’amuser avec. Après, je suis allé voir Denis en tournée où on a pris du temps pour qu’il me raconte en détails son parcours, du début à la fin. Et c’était très beau, ce moment-là. J’étais comme une éponge. En fait, il y a vraiment eu une passation de rôle assez belle et rare, je crois, et de l’avoir en plus avec moi sur le plateau le soir de la dernière, reprenant un autre personnage, c’était assez symbolique. »

Dans l’ascenseur du Français

Pour parler plus tranquillement, Loïc Corbery nous propose de faire un petit tour du côté de sa loge et en chemin, nous découvrons dans l’ascenseur toute une liste de noms de comédiens célèbres qui forment les étages abritant chaque corps de métiers. Les étages Préville et Rachel regroupent la fabrication technique (machinistes, électriciens, tapissiers, accessoiristes, costumiers, couturières, etc). Les étages Talma, Mars et Samson regrouperont les loges des comédiens. A l’étage Rachel, se trouve le fameux atelier de confection où les petites mains habiles des couturières et costumiers s’affairent du matin jusqu’au soir. « Cet atelier est dirigé par un homme d’un talent merveilleux, Renato Bianchi. Les costumiers commencent à travailler avant nous (avec les maquettes des costumes, les toiles des scènes, les entoilages) et en même temps que nous (avec les premiers essayages). Leur but est d’arriver quinze jours avant la première, afin que tous les costumes soient prêts pour les dernières répétitions. » Et pour lutter contre un trac tous les soirs grandissant, l’interprète du Menteur ou de Lully/Molière, n’hésite pas à faire un tour à l’étage des accessoiristes : « C’est un atelier de bricolage absolument merveilleux, et de temps en temps, quand j’ai cinq minutes, je les rejoins pour bricoler un peu avec eux, parce que j’adore ça. Leur atelier, c’est vraiment la caverne d’Ali Baba, et humainement, c’est agréable de les côtoyer aussi, de ne pas se contenter de les croiser dans les couloirs. »

Petite cabane à l’étage Samson

« Ma loge, c’est ma cabane. C’est un peu le bordel mais j’aime bien cet endroit même si dans l’absolu c’est un lieu où j’angoisse très vite si je me retrouve seul devant la glace. Je n’aime pas tout ce qui est de l’ordre de la sacralisation de la représentation. Avant de jouer, j’ai besoin d’être avec des gens, de faire diversion, » commente Loïc Corbery. Quasi monacale, avec ses murs blancs, sa grande fenêtre donnant sur la place Colette et sa large bande de miroir, la loge du comédien offre une tranquillité qui peut finir par se révéler dérangeante aux heures d’angoisse mais aussi de concentration. Car bien souvent la journée du comédien est longue : « une journée bien chargée mais représentative commencerait par exemple dès le matin avec l’enregistrement d’une radio pour la Comédie Française, suivie des répétitions de 14h à 18h pour un spectacle à venir et le soir, à 20h30, jouer sur scène », nous explique l’intéressé.

La spécificité de la Comédie Française est de proposer plusieurs spectacles en alternance, ce qui représente tous les soirs un vrai défi pour les comédiens et techniciens. « Pour le coup, ça casse la routine. Et en même temps il y a un principe très beau dans l’alternance, c’est celui d’avoir un grand rôle dans une pièce et un petit dans une autre. La devise de la maison, pour cela reste importante : « simul et singulis » : chacun, ensemble. »

Tous les renseignements sur la rentrée 2009 sur le site de la Comédie Française: http://www.comedie-francaise.fr/

Entretien réalisé en juillet 2009.

Crédits Photos: Mireille Ampilhac.

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