Nuits blanches et romantisme enfiévré

Créées au Théâtre de l’Atelier il y a deux ans, ces Nuits Blanches, adaptées des premières nouvelles de Dostoïevski et mises en scène par Xavier Gallais nous entraînent dans un ballet de sentiments bouillonnants et mélancoliques… romantiques, en somme.


La compagnie KGA, créée par Tamara Krcunovic, Xavier Gallais et Florian Azoulay, rend hommage à la première époque romantique de Dostoïevski, avant que ce dernier ne soit envoyé par le tsar dans un goulag et n’en revienne à jamais marqué.

Toute l’oeuvre de Dostoïevski est donc ici en germes mais en même temps, il y a cette jeunesse et cette générosité dans l’écriture des sentiments qui est ici volontairement soulignée par le jeu et la mise en scène de Xavier Gallais. En reprenant le rôle principal masculin, confié auparavant à Dominique Pinon, Xavier Gallais explore une dimension plus romantique et charnelle des rapports qui se nouent entre ces deux personnages que tout semble vouloir (dés)unir.

L’été à Saint-Pétersbourg, les nuits se font courtes. Voire blanches comme ce ciel nocturne incertain, comme cette rencontre fiévreuse, cette page vierge sur lesquels mille et un sentiments vont s’imprimer pour illustrer cette « amitié spontanée », cette amour fou et souterrain.

Car c’est une nuit de fièvre amoureuse qu’a choisi de mettre en scène Xavier Gallais avec ce décor qui repose sur les rivages d’un fleuve. L’architecture complexe des décors permet aux personnages d’évoluer et géographiquement et psychologiquement. Ils sont ainsi et de manière singulière, très éloignés l’un de l’autre au début pour devenir inséparables à la fin de la pièce. Souvent, les comédiens enjambent ce pont qui les sépare, pour se replier ensuite dans le confort de leur propre espace. Ils vont même parfois jusqu’à traverser le cours d’eau, leurs chaussures à la main pour rejoindre cet Autre, si étrange et si captivant.

RESURGENCE INSIDIEUSE DE LA REALITE

Le léger accent de la comédienne renforce l’exotisme et l’intérêt que suscite son apparition auprès du héros. Cette femme vient d’un autre monde, celui des livres, celui des rêves. Elle est aussi fragile que la page d’un vieux livre médiéval auquel elle fait référence au début de la rencontre. Son prénom-même, « Nastenka », suscite la rêverie. Elle porte des habits aux couleurs claires et pastels, une chevelure à la blondeur angélique, et pourtant son destin semble comme déjà scellé. Comme le héros, elle a choisi de suivre un rêve fou et impossible.

Sombre et romantique, ce dernier est ivre d’un amour immédiat face à cette « apparition » qui le fait vibrer pour la première fois. Il est à la fois d’une timidité maladive et d’une hardiesse sans nom. Xavier Gallais explore toute cette palette de sentiments contradictoires entremêlés, où l’ironie et l’humour percent souvent. Il campe également un jeune premier très « physique », avec ce souci du mouvement à l’image de ce langage vif et passionné qu’il défend.

Et si l’on est en droit de parler ici de la mise en scène d’un rêve amoureux un peu fou, cette relecture de Dostoïevski n’exclut pas, non plus par petites touches une résurgence insidieuse de la réalité…

Auteur : F. M. DOSTOIEVSKI traduit du russe par André MARCOWICZ
Adaptation : Xavier GALLAIS et Florient AZOULAY
Dramaturgie : Florient AZOULAY
Mise en Scène : Xavier GALLAIS
Scénographie Daniel GALLAIS
Musiques : Yann GALERNE
Costumes : Dragana OGNJENOVIC
Lumières : Jean-Luc CHANONAT
Crédits Photos: BM Palazon 2008
Avec : Tamara KRCUNOVIC et Xavier GALLAIS

En tournée actuellement: lundi 30 novembre à 20h30 au Théâtre Le Village de Neuilly (92), mercredi 2 décembre à 20h30 au Théâtre Interlude de Cholet (49), vendredi 4 décembre à 20h30 au Théâtre Le Garde-Chasse des Lilas (93), lundi 14 décembre à 20h45 au Théâtre municipal Armand de Salon de Provence (13), mercredi 16 à 21h, jeudi 17 à 20h et vendredi 18 décembre à 21h au Théâtre National de Nice (06)

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