Critique théâtre: L’Hôtel du Libre-Echange

Quel bonheur de venir à la Comédie Française, dans cette salle Richelieu, propice aux grands spectacles et à la comédie. Isabelle Nanty a parfaitement profité des lieux pour cette mise en scène de la pièce de Georges Feydeau et Maurice Desvallières, qui entre par la même occasion au répertoire. Du très bel ouvrage !

C’est la première fois qu’Isabelle Nanty met en scène dans la maison de Molière. Un challenge qu’elle relève haut la main : des décors aux costumes, en passant par le jeu infaillible des comédiens. Tout se révèle au service de cette mécanique implacable du rire, si chère à Feydeau.

Profitant de l’absence de sa femme, un architecte, Monsieur Pinglet, donne rendez-vous à sa voisine dont il est secrètement amoureux, Madame Paillardin, négligée par son mari, dans un hôtel borgne, l’Hôtel du Libre-Echange. Toute une galerie de personnages, ô combien savoureux, va toutefois contrarier leurs plans, pour le plus grand bonheur du public.

Ce qui passionne Feydeau : le joyeux imbroglio de l’intrigue, le plaisant libertinage et l’observation sociale sous-jacente ; Isabelle Nanty l’exploite parfaitement. Le rire surgit de ces personnages contrariés dans leurs plans, obligés d’improviser bien malgré eux. L’écriture des personnages est habile et on ne tarde pas à aimer ces personnages pourtant bien égoïstes et de mauvaise foi. Cette écriture comique, Isabelle Nanty l’a si bien traduite que dans la salle, certains spectateurs, redevenus enfants, réagissent de façon spontanée, en riant aux éclats, en montrant de la crainte parfois ou en n’hésitant pas y aller de son petit commentaire.

Le rire, cet acte libérateur

Le rire procuré par Feydeau libère le spectateur en même temps que le personnage sur scène. Dans un rythme endiablé qui va croissant, les comédiens jouent chacun leur « grain de folie » à la perfection.

Le personnage de Bastien, incarné par Laurent Lafitte avec tant de malice, nous entraîne dans le méandre de ces décors somptueux, conçus par Christian Lacroix. Christian Hecq, se régale dans la composition de cet encombrant M. Mathieu et Julien Frison, fraîchement nommé pensionnaire, apporte toute sa fougue et son interprétation physique pour camper son personnage.

Dans cet hôtel borgne cohabite finalement tous les milieux sociaux en même temps que toutes les forces comiques: ainsi cet univers bourgeois du début de la pièce se laisse-t’il peu à peu envahir par celui du music-hall et de la folie, pour notre plus grand plaisir. A voir d’urgence !

L'Hôtel du Libre-Echange

De Georges Feydeau et Maurice Desvallières

Mise en scène de Isabelle Nanty

Comédie Française, salle Richelieu.

Du 20 mai au 25 juillet 2017, en alternance.

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