Last Words (of humanity)

Bien des jours après sa projection officielle dans le CID plein à craquer du Festival de Deauville, ce film continue à cheminer dans un coin de notre cerveau. Uppercut de cinéma et d’humanité, il raconte de façon très réaliste ses dernières heures.

2085. Quelques hommes parviennent péniblement à survivre au dérèglement climatique qui s’est abattu sur eux depuis quelques décennies. Beaucoup de pays ont été tout simplement rayés de la carte par une mer rouge de pollution ou par un désert purement asphyxiant.

Le jeune héros dont nous suivons le parcours tout au long du film, vit à Paris dans une précarité et une violence la plus totale. Il n’y a quasiment plus de ressources pour se nourrir, dans la rue et les derniers survivants, soumis aux plus bas instincts, finissent par s’entretuer.

Obligé de quitter Paris, notre héros fait route vers l’Italie. Arrivé par hasard dans ce qui reste de la Cinémathèque de Bologne, surprenante caverne claquemurée de vieilles affiches de cinéma, dans les décombres de la ville, il rencontre un bien surprenant ermite interprété par (l’immense) Nick Nolte. Celui-ci, décidé à vivre les dernières heures de sa vie, isolé des hommes, s’est réfugié dans la projection de vieux films grâce à l’utilisation de vieilles bobines de films encore en état de livrer tous leurs trésors.

Le jeune garçon est fasciné par toutes ces images qu’il découvre de ce monde enfoui à tout jamais, où il était possible de se retrouver entre amis pour faire la fête, boire un verre, aimer…jour2fete-last-words-image-2312

Une humanité à réinventer d’urgence

Ce conte philosophique pour certains ou film d’anticipation pour d’autres, propose une véritable réflexion sur l’état dangereux dans lequel nous sommes entrain d’enfermer notre planète. Montrer une vision très sombre mais non moins réaliste de notre humanité dans un avenir finalement assez proche, est aussi une façon de nous révéler sa signification, son importance, sa saveur unique et la nécessité urgente de la préserver.

La planète nous nourrit, à travers son écosystème et ses saisons. Mais l’homme s’est depuis bien longtemps totalement déconnecté de ce cercle d’abondance. Il ne vit plus que sur des réserves sans goûts (de vieilles bouteilles d’eau marronnasses ou de boites de conserves dont on n’ose imaginer la date de péremption !).

Et ici, le cinéma dans sa forme totalement originelle (grâce au recours à la projection de films sur pellicules argentiques) permet de lier une dernière fois les hommes entre eux, de leur donner un sentiment d’appartenance, de communauté qu’ils ont perdu depuis bien longtemps. En effet, l’humanité dans ses dernières heures est en proie à l’extrême solitude, à la perte progressive de la raison et à sa faculté originelle de communication.

A la façon d’un Cinéma Paradiso, Last words représente le cinéma dans sa forme la plus simple, lui déclare son amour et nous révéle la richesse de notre humanité qui a tout à gagner à recréer d’urgence ce lien brisé d’avec la nature.

Un film humain et poétique d’une violence inédite et nécessaire.

NB :
Après la projection de ce film-choc une conférence de presse passionnante sur le sujet des solutions alternatives pour lutter contre le dérèglement climatique avait été organisée en présence du réalisateur Jonathan Nossiter et d’experts dans les domaines, des sciences, de la permaculture, de la politique et de la médecine.

Last words

De Jonathan Nossiter

Avec Kalipha Touray, Nick Nolte, Charlotte Rampling…

Sortie nationale le 21 octobre 2020

 

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