Théâtre: Anna Christie, à quelques jours de la première…

Dans moins d’une semaine, la pièce d’Eugene O’Neill, Anna Christie, écrite dans le début des années 20 aux USA, sera jouée sur la scène de l’Atelier. Autour de leur metteur en scène, Jean-Louis Martinelli, les comédiens Mélanie Thierry, Stanley Weber et Feodor Atkine ont évoqué leur travail commun au service de cette pièce âpre, tragique, romantique et réaliste à la fois.

C’est en fin d’après-midi, en ce début de mois de janvier pluvieux, après une séance de répétitions, qu’une petite troupe de blogueurs rencontre celle d’Anna Christie. Dans la grande et belle salle du théâtre de l’Atelier, les comédiens ont pris place, un mug à la main, devant le rideau de fer baissé, pour mieux protéger les décors de nos regards trop curieux.

Jean-Louis Martinelli avait déjà mis en scène, par le passé, une pièce d’Eugene O’Neill, Le Deuil sied à Electre. Il souligne d’emblée l’écriture tragique d’O’Neill, teintée d’une indéniable force vitale, réaliste et sociale qui le rapproche souvent d’Ibsen ou de Tchekhov.

Mais tout d’abord, que raconte Anna Christie ? A la mort de sa femme, Chris Christopherson (Feodor Atkine) a abandonné sa fille Anna (Mélanie Thierry) dans une ferme avant de repartir en mer. Il l’attend dans un bar crasseux de New York sans l’avoir jamais revue. Il va l’emmener en mer « pour qu’elle se repose ». Elle a surgi de nulle part, tout comme le marin Burke (Stanley Weber), repêché en mer…

C’est Mélanie Thierry qui avoue être à l’origine du choix de la pièce. Après sa première expérience, heureuse et remarquée, au sein du théâtre de l’Atelier, dans Baby Doll de Tennessee Williams, aux côtés de Xavier Gallais, mise en scène par Benoît Lavigne. Elle fait appel à Jean-Louis Martinelli, qui ne tarde pas à constituer son équipe artistique.

La recherche de l’autonomie féminine, en clé de voûte

Anna Christie, explique Jean-Louis Martinelli, illustre les thèses féministes en vogue de l’époque à Greenwich Village. C’est un personnage proche de la Nora de Une Maison de poupée. La recherche de l’autonomie d’Anna, dans sa propre revendication est la clé de voûte d’Anna Christie. Mélanie Thierry, de préciser : « C’est un personnage qui a vécu ses premières années dans le sentiment de l’abandon ; femme obligée de se prostituer pour vivre, elle ressent ainsi un véritable mépris pour les hommes. J’aime ce personnage qui malgré tout, cherche à se tenir droit, qui ne va jamais chercher à se complaire dans une forme de pathos. »

Dans ce bateau dans lequel Anna va côtoyer son père (« qui ne sait pas dire la vérité », précise son interprète Feodor Atkine) puis ce marin rescapé d’un naufrage (décrit par Stanley Weber comme un « grand naïf, peu enclin à exprimer ses sentiments »), Jean-Louis Martinelli évoque en quelques mots la scénographie maritime de sa pièce, qui débute dans un bar, non loin du port de New York, puis dans la cabine de ce bateau agité, à travers un dispositif simple de toiles peintes, qui montent et descendent pour représenter le vent, la mer, « dans une idée de faux théâtre réaliste ». Feodor Atkine d’ajouter : « Dans cette pièce, la mer a une grande importance, comme une forme de divinité tutélaire. » « Symboliquement, c’est un lieu tumultueux mais qui nettoie aussi, » souligne Mélanie Thierry.

Confronté aux éléments climatiques violents et à ce couple père-fille plutôt surprenant, le personnage de Burke incarné par Stanley Weber, va évoluer, devenir un autre homme. C’est un personnage qui vit « dans l’arrogance de sa jeunesse, empreint d’une forme de romantisme à l’état brut ». Pour mieux le comprendre, le comédien avoue avoir lu et travaillé dans un premier temps la version originale du texte en anglais. Mais au bout d’un mois et demi de travail et de lecture, l’adaptation de Jean-Claude Carrière, dans sa façon de sculpter le texte à nouveau, de le traduire, de le redynamiser (par exemple, dans ce quatrième acte volontairement tronqué), a tôt fait de l’aiguiller dans son jeu. « Au fur et à mesure, je me rendais compte à quel point les partis-pris de Jean-Claude Carrière étaient fins et subtils », conclut le comédien.

Gageons que cette rencontre chaleureuse nous aura bien donné envie de retourner très prochainement au théâtre de l’Atelier…

Anna Christie
Mise en scène de Jean-Louis Martinelli
Avec Mélanie Thierry, Feodor Atkine, Stanley Weber, Charlotte Maury-Sentier.
A partir du 20 janvier 2015.
 
Théâtre de l’Atelier
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Crédits photo: Théâtre de l’Atelier.

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