Critique théâtre: La Peste

Le calme dans la salle des Mathurins ne s’est pas encore totalement fait mais déjà Francis Huster est monté sur scène, s’adressant à son public. Avant de se frotter au texte de Camus (pour la 960ème fois ce soir-là), quelques mots d’introduction lui viennent, généreusement, pour souligner la force de l’œuvre de Camus, ce « journaliste » avant d’être écrivain. Cet homme épris du fond plutôt que de la forme.

Il s’agit de la « première » de cette nouvelle série de représentations que le Théâtre des Mathurins abrite le temps de l’été. Pour l’occasion, Francis Huster évolue dans un décor singulier : une station de métrop baptisée Albert Camus, encadrée par des affiches d’Oran, de cette Algérie d’avant la guerre d’indépendance.

Évidemment, la passion du comédien pour son auteur fétiche, Albert Camus est palpable. Depuis 35 ans, sous l’injonction de Jean-Louis Barrault, Francis Huster a joué La Peste et ce, aux quatre coins de la planète.

Pas étonnant que le texte, en ce soir de première, l’accompagne matériellement à ses côtés, même si visiblement le comédien le connaît par cœur. A un quart d’heure de la fin, il s’en affranchira même complètement et le laissera définitivement de côté, ce texte réécrit par lui-même (dans le sens littéral), surligné en couleur fluo par ses propres soins pour mieux se l’approprier.

C’est avec fièvre et un puissant contrôle à la fois que Huster interprète cette galerie de personnages. Il est pourtant seul maître à bord, ayant également signé sa propre mise en scène.

 La passion de Camus

Ce qui fascine ici avant tout, c’est l’énergie, la passion, la vivacité qui soudainement s’emparent du comédien à l’assaut du texte. Camus est un être grave, passionné de théâtre, mais non dupe de son temps. Et c’est ce qui probablement ne cesse d’interpeller le comédien. Certains personnages, interjections, semblent au début de son intervention, un peu forcés mais très vite, Huster  kidnappe l’attention de son public.

Comme dans Le Joueur d’échecs qu’il joue conjointement cet été au théâtre Rive Gauche, Francis Huster sait raconter une histoire, la rythmer, la faire vivre de l’intérieur, en souligner par petites touches ses instants absurdes comme poétiques.

Une salve d’applaudissements, tonitruante et chaleureuse, viendra répondre à cette heure et demie où la fascination d’un interprète pour son auteur est comme palpable, de bout en bout.

La Peste d’Albert Camus
Avec Francis Huster
Mise en scène de Francis Huster
Théâtre des Mathurins

Post A Comment